#Onceaweek 0037 by Henri-Bernard Musso


Qui voici voilà? Ce cher Henri-Bernard Musso est de retour pour la 4è fois et sa 3è spéciale. Comme il est un peu fâché avec les règles et les consignes il a feint de mal comprendre et playlisté 21 titres dédiés à l'immense Notorious B.I.G, disparu il y a tout juste 20 ans, à 23 ans et millionnaire, comme l'avait prédit celui qui le sortit définitivement de la rue, son mentor Puff Daddy... 3 ans auparavant! HBM lui taille le portrait à sa manière... Cet iconoclaste de papier glaçant, terreur des scribouillards ultra-médiatiques et auquel les écrivaillons en manque de reconnaissance délivrent un véritable culte occulte, viendra de temps à autre nous apporter ses lumières musicales et nous parler d'autres choses si ça l'enchante. Chantre de son bon goût et des mauvaises manières, HBM a la plume acérée: les gouttes d'encre peuvent tomber! 

La mixouille pour accompagner la lecture:


«  NOTORIOUS BIG : LE KING DE NEW YORK »

Rencontre avec Pascal le taxi, et Jordan, le king de Courcy dans la Marne.

17 heures zéro quatre. 14 avril 2017. Direction Reims.

Sacrebleu, nous étions foutrement en avance pour le meeting du Petit. Le chauffeur du taxi fonçait sur l'A4. La radio crachait du Hip Hop East Coast. J'en avais écouté chez Lolo Garnier la veille au soir, en sortant du flore. Les enceintes tremblaient. Notre chauffeur en baskets américaines et baggy s’appelait Pascal. En souriant, il rajouta: « Comme le grand frère ». Ma cantatrice squelettique et Moi-même-Personnellement-Je étions attendus à Reims pour le meeting du nouveau chouchou des Français de Gauche, de centre droit, du milieu: Emmanuel Macron. Sa femme ressemblait à la mienne, mais en plus vieille.

- Je vous reconnais. C'est vous le mec qui fait de la philo, à la téloche on vous voit, avec la tarte à la crème et tout ça. Moi, la politique de toute façon ça m'emmerde! Mais bon, si ça peut changer quelque chose à tout ce merdier, cria Pascal.
- Je ne vous entends pas mon cher ami! Ma femme dormait depuis Paris. Chanceuse, elle avait mis ses boulquies.
- Pardon, gueula-t-il.
- Le son! Je lui fis le geste de baisser.
Il baissa de suite le volume.
- Désolé m'sieurs dames! Dès que c'est Notorious Big, je me contrôle plus. J'peux pas m'empêcher de foutre à balle. Faut que ça crache! J'adore putain, j'adore! Je kiffe grave ce son de la grosse pomme, gros. Ça et Tupac! Tu connais un peu ou bien?
- Euh, je... Pas du tout! Enfin un peu...
- Si, si, c'est obligé que tu vois qui c'est le type, quoi! Un gros blackos avec une couronne sur la tête, qui s'est pris deux bastos dans le bide. Ça te parle ou pas? Si, quand même... Non?
- Euh non... Mais ça m'intéresse... Pour mes chroniques pour les jeunes Macroniens. Je suis un humaniste, j'aime être en phase avec les autres, avec mon temps. Je m'interroge sur tout, tout le temps. Je me nourris du contingent. C'est à la mode le Rap en plus.
- Ouais ouais si tu le dis... Enfin, à la mode, t'es pas ouf dans ta caboche toi! Excuse mon langage, mais le Rap, c'est comme le gras garçon, c'est la vie putain, dit-il en ajoutant un clin d’œil malicieux. Ça te dit qu'on s'arrête prendre une bière chez mon couse? Il est grave fan de hip-hop. Il connaît Big Poppa sur le bout des doigts en plus.
- Pourquoi pas, musicalement et humainement tout est investigation dans ma vie.

18h32.
Nous déposâmes Arielle à l'hôtel de ville de Reims. Le meeting commençait à 20h. Nous avions 1h30 devant nous. J'aimais le style de Pascal, il me faisait rire. Son atypisme faisait chaud au cœur.

- T'inquiètes, je te le ramène pour 20h pile poil ton mari, dit-il en s'adressant à ma femme. Le reste de la course c'est pour Bibie. On va aller voir le Jordan, il est super sympa tu verras. Tu verrais l'artiste. On dirait un mec du Bronx. Il est super cool. Il rappe en continu.

18h45. Nous arrivâmes à Courcy, en périphérie de Reims, devant une maisonnette de bric et de broc. Une voiture tunée trônait dans la cour. Une niche en bois avec un toit en forme de couronne de princesse était posée au pied de l'escalier. Un gros Notorious était peint à la bombe sur le côté. Pascal mit un coup de frein à main. Les gravillons volèrent dans l'air. Il rajouta son éternel clin d’œil. J'aimais vraiment bien Pascal. Il était fou. La porte de la maisonnette s'ouvrit d'un coup. Un gringalet géant avec casquette immense, baskets de sport et chaînes en or autour du coup arriva en courant, suivit d'un chien agressif.
- Notorious, tu rentres à la maison! Notorious, putain!
- Hé! Ma caille, ça va? lui balança Pascal.
- Tranquille! Et toi face de cul? Et lui, c'est qui?
- Un ami, fan de hip-hop. Tu paies ta binouse?
- You're welcome les Bro'! Viendez à la cave. Tu vas voir, j'ai refait toute la déco! Ça déchire.

Nous arrivâmes dans une sorte de trou noir, une cave incroyable, la caverne d'Ali Baba. Un mausolée sur-éclairé à la gloire du rappeur afro-américain à couronne. Jordan était un être sublime. Il ne parlait pas, il rappait.

- Notorious Big, c'est ma came, depuis tout petit. Il s'est fait fracasse en 97, dégoutté. Trop de talent. 20 ans qu'il est mort, 20 piges putain! Ready To Die, son premier album c'est un bijou, un putain de bijou. Imagine, il a juste rappé pendant 6 ans, de 91 à 97, et c'est devenu une pointure direct, un mythe. Mais ils lui ont tiré dans le bide à L.A, ces connard de la West Coast, petites salopes, beh ouais, trop de rivalités, trop de talent le type... Écoute ça ma poule, c'est ouf!
Un titre puissant arriva à mes oreilles. Les basses frappaient fort, la batterie était judicieuse, et la voix était posée à merveille. Gutturale et césurée, elle semblait sortie d'une caverne de Harlem. J'aimais vraiment. C'était assez bizarre comme sensation. Ça me changeait de Bashung ou de Pierre Boulez et Steve Reich.
- Après t'as Life After Death, alors là c'est la claque! Un disque de diamant gros, direct! Un bijou putain de merde! Et regarde moi cette gueule, beugla Jordan, la larme au coin de l’œil.
Jordan dirigea son index vers une peinture géante de rappeur posée contre un des murs du fond. Il me tendit une Kronembourg direct à la canette. C'était charmant, incongru. Ils enfumèrent le terrier avec leurs cigarettes roulées. Jordan était possédé.
- Le Big Poppa c'était un putain de producteur, un rappeur de ouf, politisé à balle, oldschool à mort le type. Moi je suis le king de Courcy, mais lui mon pote, c'était le king de New York. Il est mort à 24 piges, imagine s'il était encore là. Fulgurant, incroyable. Je connais son taf de bad boy sur le bout des doigts. Je collectionne tout. T'as vu le merdier ici. C'est ma pièce à moi. J'ai des tee-shirts, des cassettes audio, des vinyls, des skeuds, de la face B, du live, du bootleg... Tu veux bédaves un peu ou pas? On se met tranquille en écoutant le Christopher, ça le fait?
- Pourquoi pas oui? Bédave?

Trou noir.
Ensuite, je me souviens avoir tiré deux ou trois bouffées sur leur cigarette, et puis... Le son envahit mon corps. J'avais une couronne sur la tête, un micro dans la main. J'étais à Brooklyn, avec Dj Pascal et MC Jordan. La cave tournoyait. Je caressais Notorious le chien. Il était gentil, comme Snoopy. Biggie Smalls m'embrassa sur la bouche, Christopher George Latore Wallace me signa un autographe, rechargea son gun. Jordan enchaînait lesjoints en dansant, Pascal, les cannettes... Nasty boys, Hypnotize, One more chance... Ça rappait dans tous les coins. Je vomis sur mon chèche. 19H45. Pascal et Jordan me montèrent dans la bagnole.
- T'es un gangsta HBM, un gangsta! Tu repasses quand tu veux! Allez file !

22h45. A l'ouest coast, je me réveillai groggy sur les marches de l'hôtel de ville de Reims. Arielle faisait la gueule. Au retour, ce fut Jean-René qui nous ramena dans son taxi, pas Pascal, comme le grand frère. Je me fis un clin d’œil à moi-même. En rentrant dans notre appartement du 16ème, je me jetai sur Youtube en écoutant en boucle le grand, le gros, le géant NOTORIOUS BIG. En boucle, en gun, en beats, en couronne...

Ce mix à la sauce hexagonale sur le blog Free&Legal est donc pour vous les gangstas. Mon plaisir deviendra le vôtre, je l'espère. Ne me remerciez pas, remerciez NOTORIOUS BIG même si mon humanisme et ma plume montre ma dévotion à votre égard chers lecteurs. Tout comme Pascal et Jordan, je suis une chance, un mélomane, profitez-en, et ruez-vous sur les galettes des années 90 estampillées Bad boy Records. Vous ne serez pas déçus.

Littéralement, philosophiquement et musicalement.

HBM, philosophe, reporter et bloggeur militant.


La playlist:
019. Biggie vs ATCQ - Check the Bullshit*

*apupourlemoment

HENRI-BERNARD MUSSO

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